Nicolas Bridot nous livre ses impressions de stage au Temple-sur-Lot en juillet 2025…
Premier stage estival à Temple sur Lot
Il n’est jamais trop tard pour commencer. Cela fait désormais dix ans que je pratique l’Aikibudo et le Katori Shinto Ryu sans avoir jamais participé à un stage estival. Il était donc grand temps pour moi d’en faire l’expérience et, puisque l’on me le propose, de la partager avec un œil neuf. En effet, des yeux nouveaux, il n’y en a pas tant que ça dans ces lieux, car les stages estivaux sont fréquentés par des habitués qui s’y rendent parfois depuis que ces événements existent. Saisissons donc cette occasion pour, peut-être, vous convaincre d’y venir ou d’y revenir !
Un haut lieu d’apprentissage
Quel que soit son niveau, rien de tel que du temps de pratique pour consolider ses compétences. Et du temps de pratique, il y en a. Deux séances d’une heure et demie le matin, puis une reprise l’après-midi pour au moins deux heures d’entraînement avant le repas. Les cours commencent par des échauffements dispensés par des personnes de tous horizons, ce qui permet à la fois de varier les plaisirs et de revenir dans son club avec de nouveaux exercices en poche.
Les thèmes abordés sont variés et, si l’on ne manque pas de découvrir quelques techniques exotiques, du temps est consacré aux éléments fondamentaux du programme que l’on révise intensément et en profondeur. On pourrait s’attendre à des différences de façon d’exécuter des techniques entre les clubs, entre les pays, ou même les continents, mais c’est tout l’inverse. Un travail d’harmonisation de la pratique à été consciencieusement effectué par les cadres techniques au fil des années et on se retrouve, sans parler un mot de Hollandais ou de Tchèque, à dialoguer avec le corps dans une langue commune. C’est assez unique, non ?
Le rythme est soutenu et vous vous réveillez dès le deuxième jour avec des courbatures partout. Il faudrait être un grand sage pour modérer son effort tout au long de la semaine et tenir un rythme moyen et constant. Ce ne fut pas mon cas et, je le crois, pas le cas de grand monde. Qui viendrait à un stage d’arts martiaux pour faire preuve de sagesse ? Toutefois, n’allez pas croire que le stage est trop physique pour être suivi en entier, car les sensei qui l’ont vécu avant nous savent lorsqu’il faut lever le pied et leur enseignement est adapté à l’état du groupe tout au long de la semaine.
“Le budo en partage”
Ce n’est certainement pas un hasard si le sensei a donné ce nom à son dernier livre. Si les clubs sont déjà des lieux de rencontres et de création d’amitiés, les stages estivaux le sont tout autant mais d’une façon différente. Vous y passez du temps avec des gens que vous aviez déjà croisé entre deux kotai en stage, que vous aviez aperçu dans des vidéos d’événements, vus sur les réseaux, que vous aviez croisé sans vraiment les rencontrer.
Le stage de Temple sur Lot a cette particularité qu’il se déroule dans un cadre unique, un espace zen au bord de la rivière où tout le monde prend ses repas ensemble, où l’on peut profiter d’une piscine adjacente au dojo, où l’on passe ses soirées ensemble à jouer à des jeux, à écouter de la musique, à boire des bières si l’envie nous prend, et même à aller à la fête du village du coin. J’ai lu quelque part qu’il fallait une cinquantaine d’heures passées avec quelqu’un pour commencer à développer une amitié, ce quota est bien atteint à la fin de la semaine !
Un cadre de films d’arts martiaux
J’ai déjà un peu parlé du cadre en disant que le stage se déroulait dans un espace Zen, au bord de la rivière. Le Domaine de Lembrun est un lieu dédié aux activités de groupe comme les nôtres. On y trouve des retraites bouddhistes, yogiques (pas sûr que ça se dise), d’autres stages d’arts martiaux. En effet, le domaine possède deux dojos fermés et un dojo en extérieur, avec vue sur la rivière, le soleil couchant… et les moustiques, il faut bien l’avouer.
Vous êtes là-bas en immersion totale. Vous pourriez y mener une vie d’ascète en mangeant peu, en faisant de l’activité physique, en portant des seaux d’eau jusqu’au sommet d’un temple de pierre… ou bien vous pouvez profiter de la piscine, du bar, des hamac, et des repas généreux dispensés par les gérants du domaine, entre deux entraînements bien sûr.
Des sensei très accessibles
C’est peut-être le principal avantage à faire partie d’un art martial confidentiel comme le nôtre, nous sommes suffisamment peu nombreux pour que chacun ait la possibilité d’échanger avec des hauts gradés qui ont offert leur vie à ces arts que sont l’Aikibudo et le Katori Shinto Ryu. Beaucoup d’entre eux ont participé à presque toutes les éditions de ces stages et ils sont chacun pleins d’anecdotes qu’ils racontent sans hésiter. C’est ainsi qu’on peut en apprendre plus sur le sensei, sur la façon dont il a dispensé son savoir, fait évoluer sa technique, développé son art. Les anciens pratiquants ont eux aussi beaucoup d’épisodes à raconter sur leur progression personnelle et la façon dont ils ont développé leur technique. On peut échanger librement sur la pédagogie, la transmission de l’art, sur les obstacles que l’on rencontre dans notre progression et, en dehors des sujets martiaux, on apprend à connaître les humains derrière les Tsuba rouges.
Animer notre art, lui donner vie
Les arts martiaux traditionnels n’ont pas autant le vent en poupe que dans les années 80, c’est une certitude. Il y a des modes qui vont et viennent et nous n’avons pas un grand pouvoir pour les influencer. Pour autant, il ne faut pas se résigner et se laisser abattre par notre nombre qui s’amenuise un peu avec le temps. Notre petit groupe peut et doit rester vif si l’on veut que notre art traverse le temps.
Les événements comme les stages estivaux sont des occasions rêvées de tisser des liens entre pratiquants de différents clubs et pays, de consolider notre noyau dur d’adeptes et ainsi de garantir que notre art reste bien vivant. On y cultive notre sentiment d’appartenance à un groupe, on harmonise notre savoir-faire technique entre pratiquants, on rit, on crée des souvenirs en commun, on vit et on fait vivre notre art.
J’espère que ce texte vous aura donné envie de venir ou de revenir à un stage estival. Si c’est le cas, n’hésitez pas à convaincre quelqu’un de vous accompagner car, vous l’aurez compris, plus on est, plus on vit !